Nous voilà en Ecosse et ses fameux « highlands », objectif majeur de notre voyage
cet été. Montagnes majestueuses à la norvégienne, « rias » et petites maisons à la
bretonne, dont nous essayons de profiter au mieux malgré une météo en dents de scie…
Plus de photos de plus en plus ensoleillées et un petit film de drone dans notre
page
Photos
114 milles navigués
990 milles parcourus depuis le départ
Nous n’avons pas fait justice à Lochinver… ou serait-ce l’inverse ? Un ciel
bouché, une pluie continue, nous n’aurons vu qu’un petit ponton assez cher, une
douche à peine en état de marche, et un ballet de bateaux de pêche industrielle.
Nous ne nous arrêtons que quelques heures pour dormir après notre longue
navigation depuis les Orcades, puis repartons vite profiter de ce bon vent de
Nord pour continuer notre route vers le Sud, à la poursuite de l’évasif
anticyclone des Açores !
Le port, c'est tout ce que nous aurons vu de Lochinver
!
La côte se dévoile enfin et nous pouvons voir autre chose que simplement des
macareux
La navigation commence comme elle avait fini la veille, un bon vent portant sous
la pluie et la grisaille, dans une houle assez marquée. Mais en début
d’après-midi, il y a du changement dans l’air… D’abord il ne pleut plus. Et puis
les nuages s’affinent, on distingue la silhouette d’une côte, des montagnes
semblent émerger progressivement. Devant à tribord, l’île de Skye se dévoile. Et
finalement nous voyons même les Hébrides extérieures apparaître.
Nous voyons toujours de nombreux macareux et guillemots, mais les fulmars et
skuas ne semblent pas s’aventurer aussi sud. Les fous sont également beaucoup
moins nombreux. Ils ne doivent pas supporter cette chose étrange qui nous
éblouit dans le ciel : un rayon de soleil !
Il y a toutefois un avis de grand frais (force 7)
prévu le lendemain, et nous
tirons la barre pour rentrer dans le fjord de Gairloch. Ou plutôt le loch de
Gairloch, comme on dit ici. En gros, c’est la même chose (bras de mer creusé par
la glace entre de hautes montagnes), mais version écossaise.
Le paysage devient de plus en plus grandiose au fur et à mesure que les nuages
se dissipent, et Saltimbanque s’amarre à la seule place disponible de ce tout
petit port de pêche au creux des fameux Highlands.
Gairloch, principalement un port de pêche, mais avec une place pile de la taille
de Saltimbanque.
!
19 juin: Gairloch (à terre)
C’est finalement à Gairloch que nous ferons notre véritable premier contact avec
l’Ecosse des Highlands. Le petit port est orienté vers la pêche au casier, et
les promenades en mer pour les touristes… qui ne sont manifestement pas encore
arrivés. Il flotte un air d’hors-saison, et les quelques camping-cars déjà
présents ne rompent pas le charme authentique de l’endroit. On en profite
d’autant plus que la première nuit au ponton est gratuite pour nous qui venons
de Lochinver : en effet les ports gérés par le Harbour Highland Council
(Kinlochbervie, Lochinver, Gairloch, Kyle of Lochalsh et certains autres)
pratiquent un forfait de « une nuit achetée, la suivante gratuite » dans tous
leurs ports.
Saltimbanque au coeur des Highlands Ecossais
L’Ecosse : une plage, des montagnes, et un golf entre les deux !
Nous marchons jusqu’au village pour faire quelques courses, très chouette balade
le long de belles plages avec vue sur la mer et les montagnes. Les commerçants
nous confirment que le temps est particulièrement pourri cette année… Et
pourtant nous constatons un réel progrès : l’air et la mer gagnent
définitivement quelques degrés chaque jour (indicateur infaillible : notre
bouteille d’huile d’olive est en train de redevenir liquide et non plus
trouble), il fait déjà moins humide et sans être totalement sec le bateau est
déjà plus vivable.
L’après-midi, Laure part courir sur les sommets environnants. On se croirait
vraiment en Norvège de l’ouest ! Géologiquement, ce sont les mêmes montagnes et
la similitude est flagrante !
Norvège ? et non, Ecosse !
20 juin: Gairloch – Shieldaig (22M)
Il faut profiter de cette journée aux conditions tranquilles!
Le vent a tourné et nous devons maintenant tirer des bords. Peu importe, il
souffle un petit force 3 très agréable, sous un ciel clair et la houle de nord a
été bien aplatie par le vent fort de sud de la veille. Quel bonheur de ne plus
naviguer en ciré, et de pouvoir aller à l’avant du bateau prendre des photos !
Bob barre et nous profitons du joli paysage : les montagnes à la côte, et l’île
de Skye aux sommets constamment cachés par les cumulus. Il faut dire que Skye
vient du vieux norvégien « sky » qui signifie… nuage ! Il ne manque qu’un
maquereau ou deux pour parfaire ce tableau, la pêche étonnamment ne donne rien…
L'ile de Skye à l'horizon et son profil si particulier
Saltimbanque se faufile dans le loch Torridon
Nous n’allons pas bien loin aujourd’hui, comme
un nouveau grand frais force 7 de
sud est prévu la nuit prochaine… Nous allons donc nous abriter dans le loch
suivant, le loch Torridon, réputé majestueux. Et en effet nous nous faufilons
entre de très belles petites montagnes pour atteindre le village de Shieldaig et
sa baie protégée de sud. Nous hésitons à mouiller notre ancre, mais les
montagnes pouvant parfois générer quelques rafales catabatiques, nous
choisissons finalement un des deux coffres visiteurs. Une sage décision comme
l’avenir le prouvera…
Mais pour l’heure, il fait beau ! Si si ! Et presque chaud, 18 degrés dans la
cabine, du jamais vu encore ce mois de juin ! Nous ressortons notre annexe qui
dormait au fond du coffre depuis le tour de la Baltique en 2018 et nous préparons à
descendre à terre. Pour notre plus grand bonheur, notre moteur hors-bord réparé cet
hiver avec l’aide de notre copain André (merci André !!) démarre au quart de tour et
nous emmène jusqu’au petit ponton maintenu par la communauté locale. En Ecosse du
Nord, les infrastructures pour les plaisanciers semblent souvent être la propriété
des communautés locales, et il faut pour payer la nuit déposer l’argent dans une «
honesty box » à terre. Ou alors, par virement bancaire aux organismes concernés (ce
que l’on finira par faire ici, à défaut de trouver la boîte en question).
Shieldaig est un joli petit village très calme. Encore moins touristique que
Gairloch, il consiste en une rue de petites maisons blanches face au loch et ses
montagnes, 86 habitants et un école. Il a été fondé en 1800 comme une base
d’entraînement pour les soldats des guerres napoléoniennes, puis s’est tourné vers
la pêche après 1815. Nos pas nous mènent jusqu’au bout de la pointe, avec vue sur le
loch principal qui s’enfonce encore d’avantage dans les montagnes. C’est absolument
magnifique ! On commence à rencontrer quelques « midges » par contre, ce fameux
petit insecte piquant très désagréable qui prolifère en Ecosse… Mais pas assez pour
nous gâcher notre chouette balade.
La rue de Shieldaig vue depuis Saltimbanque
Vue vers le fond du Loch Torridon, cela ressemble de plus en plus à un lac de
montagne!
Le vent doit se renforcer cette nuit, mais nous espérons être bien abritées au fond
de notre loch. Erreur… A minuit le vent monte d’un coup et se met à souffler
furieusement. La montagne qui devait arrêter le vent de sud l’accélère au contraire,
et génère un coup de vent dans la baie. Fort heureusement nous sommes sur un bon
coffre homologué pour bateau de 15 tonnes, et attachées sur une énorme aussière de
50mm, nous devrions tenir. Mais heureusement qu’on n’est pas sur notre
ancre…
Le vent soufflera en tempête toute la nuit avant de redescendre à un niveau de «
vent fort » au matin. On a connu plus reposant… Surtout que le programme de la nuit
suivante est de profiter des 15 heures de vent maniable avant le prochain grand
frais de sud pour rejoindre le prochain loch. La journée, très belle et chaude au
demeurant, se partage entre siestes et travail sur le site à bord du bateau balloté
par les rafales…
Dès que celles-ci s’essoufflent, nous quittons cette baie avec soulagement en
espérant que la suivante sera mieux protégée. Mais ce loch est si beau qu’on lui
pardonne vite en navigant vers la sortie !
Nous quittons le loch Torridon, plus joli qu'abrité!
Les dauphins !! Cela faisait si longtemps !!
Vent faible de sud, nous tirons des bords entre l’île de Skye et la côte. Il
fait gris et humide, et de manière incompréhensible nous avons toujours du
courant de face, mais on avance quand même. C’est qu’on a un nouvel épisode de
vent fort à prendre de vitesse, on ne peut pas lambiner en chemin non
plus…
Et puis arrive exactement ce qu’il nous fallait pour nous remonter le moral
entre deux averses : un groupe de dauphins!!! 2 jeunes et 2 adultes qui vont
rester jouer autour du bateau pendant une bonne heure ! Cela faisait tellement
longtemps que nous n’avions pas vu de dauphins, il y en a très peu en Mer du
Nord et encore moins en Baltique. Magique ! Ils reviendront à deux autres
reprises en cours de nuit, même lorsque le vent nous aura abandonnées et que
nous avancerons au moteur, en ligne droite, les yeux écarquillés pour éviter les
nombreux casiers prêts à s’emmêler dans notre hélice…
Nous arrivons en baie de Plockton au petit matin,
où nous voulons prendre un des
15 coffres visiteurs pour passer le grand frais prévu. Mais à notre grand
désarroi, il y a des bateaux partout et tous les coffres sont occupés ! Ne
sommes-nous pas hors-saison pourtant ? Nous prenons un coffre qui sera très bien
même s’il n’est pas officiellement pour visiteurs et allons dormir quelques
heures, un peu fatiguées après deux nuits sans sommeil.
Ploctkon au tout petit matin, c’est beau mais ca se sait.
Finalement nous aurons la chance de trouver un coffre visiteur disponible à notre
réveil. Nous sautons dessus juste avant que le vent ne se lève et pouvons enfin nous
détendre. Nous serons bien abritées ici et c’est à peine si nous sentirons quelques
rafales.
Le village de Plockton est réputé pour être très beau, et ce n’est pas surfait.
Petites maisons presque bretonnes alignées face à la mer, jardins « 2000 ans de soin
» avec une grande mode pour le palmier « yucca », montagne presque norvégienne en
arrière-plan, le meilleur des deux mondes ! Il y a même un château pour se rappeler
que nous sommes en Ecosse.
Plockton, ses jardins impeccables avec vue sur petites maisons et belles
montagnes
La rue principale de Plockton
Autre exemple du mélange des genres : nous partons en balade le long d’une ria
toute bretonnante à marée basse, mais le long du chemin creux si familier
poussent… des myrtilles norvégiennes ! Et parmi les classiques chênes, hêtres et
houx, on trouve un sous-bois de rhododendrons ! Incroyable ! Nous n’en avons
jamais vu d’aussi gros, celui d’Egersund est battu à plate couture !
Mangrove tropicale ? Non, rhododendron ecossais!
Nous finissons par un dîner local au restaurant : haggis (panse de brebis farcie),
soupe de poisson, langoustines, black pudding et coquilles Saint-Jacques.
23 juin: Plockton – Kyle of Lochalsh (12M)
Le loch Carron sous le soleil, si si !
Petite navigation au programme aujourd’hui, quoique très agréable ! On commence
par partir du coffre à la voile, c’est quand même plus élégant – d’autant plus
quand nous sommes le seul pavillon français encerclés de britanniques ! Puis
sous le soleil et face à un bon 4b, nous tirons des bords dans le loch Carron,
entre Skye et la terre. C’est vraiment très joli par ici quand le beau temps est
de la partie (c’est-à-dire un bon 10% du temps).
Nous arrivons sous le pont qui relie l’île de Skye à
la terre juste à l’heure de
la renverse et rejoignons le petit ponton de Kyle of Lochalsh. Oh nous avions
repéré l’Ovni 365 de loin, et ses occupants, des navigateurs Québécois, nous
hèlent depuis le ponton : « venez, il y a de la place derrière nous, comme ça on
pourra jaser »
Très bien, la place est en plus plutôt bien protégée pour, devinez quoi : et
oui, un grand frais de sud attendu demain !
Kyle of Lochalsh, ponton réservé aux jolis bateaux en alu
C’est d’ailleurs dans ce « kyle » (=détroit) que Haakon Haakonsson, roi de Norvège,
avait rassemblé sa flotte pour préparer son attaque contre le jeune roi écossais
Alexander III, en 1264. Au final l’écossais, à force de délais diplomatiques,
repoussera les hostilités aux mois d’automne et la flotte sera éparpillée par une
tempête, mettant fin à la domination viking dans les Highlands. Reste le nom du
village en face, Kyleakin (= Kyle of Haakon), et quelques noms aux consonances
nordiques…
24 juin: Kyle of Lochalsh (à terre)
Quitte à être à terre, autant être efficace. Nous n’avons pas fait de lessive depuis
Lerwick et il est grand temps de récupérer quelques affaires propres. Autres
formalités logistiques : faire le plein d’eau, quelques courses et mettre le site à
jour.
Une fois nos obligations accomplies, place au social ! Eric et Clare, de
Nouvelle-Ecosse, viennent à bord discuter navigation dans le nord Canadien, Européen
et Baltique. Outre les habituels échanges d’informations nautiques, on discute un
peu : oui ils connaissent Carrick, ce Brise de Mer 28 qui a navigué au Groenland il
y a quelques années. Ils connaissent aussi les gens de la V’limeuse, dont Camille
dévorait les aventures étant jeune. Il est rare de rencontrer des navigateurs
d’outre-Atlantique, les échanges sont autant culturels que pratiques.
Le pont de l’île de Skye, à sa droite les Highlands que nous quittons
pour la côte de l'Argyll au Sud !
Nous finissons la journée par une chouette balade … en short ! (Plus exactement
en jambes de pantalons retroussées, car nous avons été surprises par la
température et ne savons même plus où sont rangés nos shorts en fait). Vues sur
l’île de Skye, bateaux de pêche mouillés au fond des criques, exploration de
l’estran de sable blanc… les influences se mélangent toujours et nous commençons
à nous habituer aux spécificités des paysages d’ici.
Demain l’anticyclone devrait gonfler en une dorsale nous promettant 2 jours de vent
assez faible, nous pourrons continuer notre route vers le sud ! Au programme, le
passage du Kyle Rhea, qui sépare Skye du reste de l’Ecosse et qui, avec ses forts
courants de marée est un passage à niveau entre les Highlands et la côte de l'Argyll au Sud...
Achiletjoce - 05/07/2024 22:07:35 Coucou les filles
Ravis de vous retrouver sur l'eau.
Toujours aussi sympas vos aventures et votre plume enrichissante.
Belles contrées traversées, que de vents du sud! L'été n'est pas encore arrivé en Bretagne, profitez du climat écossais.
On vous embrasse SuDad - 03/07/2024 21:52:12 On s'essuie machinalement le visage à ces descriptions météorologiques.(un peu honte d'être au sec et au chaud). Tous ces paysages légendaires, ces noms qui ont "de la gueule", les avoir sous les yeux, ça doit émouvoir. Peut-être pas autant que l'humidité, évidemment. "Connaissance du monde" en Ecosse, on y est. Evidemment, les bruits, la pluie, les odeurs, les embruns, le vent, ça s'imagine moins bien. Vous, les actrices, vous remplissez merveilleusement le contrat, pour nous spectateurs, bouche bée.
Chouette séance. Merci. A la prochaine... mum - 03/07/2024 20:28:48 le rhododendron est phénoménal ,serait il arrosé de whisky Kirstie & Neil S/Y L’Escale - 03/07/2024 15:47:48 This post is a beautiful combination of precious memories, and views of the many places we missed in these spectacular waters…but from your descriptions, the weather we experienced in 2017 wasn’t unusual for this time of year. What treasures when the fog and rain clouds lift ;-) Etienne - 02/07/2024 14:56:39 Désolé pour ma maladresse 2 commentaires vides ! Voilà l'Ecosse magnifiquement racontée et décrite. Bravo pour votre parcours dans une météo pas très conciliante. Je me rend compte aussi qu'on a eu beaucoup de chance d'avoir pu goûter aux 10% de beau temps ! On vous souhaite une belle météo en mer d'Irlande. la mamou - 01/07/2024 09:50:04 Bien beau mélange de Norvège et de Bretagne ....Dommage que le temps soit plus que breton ...Il faudra revenir ...;-)